Produire du lait de chèvre bio en filière longue ? C'est possible !

Alors que la demande semble en plein boom, une majorité du lait de chèvre bio transformé en France est issue d’importations européennes. En Hauts-de-France, la dynamique de l’offre en filière longue se structure progressivement, avec une 1ère collecte engagée ce printemps.

Ils sont trois éleveurs à s’être lancés récemment dans ce projet : anciennement éleveurs de bovins laitiers, la conversion animale s’est achevée le 6 avril 2020. La Prospérité Fermière, coopérative laitière située dans le Pas-de-Calais, a pu engager la collecte bio dans la foulée. Ensemble, ils élèvent 900 chèvres et la collecte 2020 sera proche des 950 000 litres. La collecte conventionnelle est bien sûr maintenue pour les autres producteurs en cours de conversion. Et la filière a des arguments pour s’agrandir, car la demande est là ! Le prix du lait en 2020 est de 945 ¤/ 1000L en moyenne, avec 4 mois d’hiver à plus de 1 000¤ /1 000L. Avec l’agrandissement des cheptels actuels et l’arrivée de nouveaux producteurs en conversion, la filière comptera à minima 2700 chèvres réparties sur 7 fermes, avec une production annuelle de 2 millions de litres en 2020. Une dynamique naissante qui laisse augurer de bonnes perspectives.

Mais qui dit chèvre bio, dit chèvre « pâturante » ! Et la chèvre présente une certaine fragilité au parasitisme. Voici donc quelques conseils pour gérer au mieux cette difficulté dans notre région, souvent injustement accusée d’être trop humide pour elle.

La chèvre, un animal fragile

La chèvre mange naturellement «  le nez en l’air » : en effet, elle apprécie la végétation arbustive et ligneuse. Avec l’évolution agricole récente, la suppression des haies notamment, elle s’est adaptée à manger « tête basse ». C’est pourquoi son système immunitaire répond mal au risque parasitaire. Pour identifier les parasites présents, deux analyses sont possibles :

  • La coproscopie  : analyse qui identifie les œufs de parasite dans les crottes. Préventive, elle trouve son intérêt quand elle est répétée. Le comptage doit être fait toutes les six semaines, tous les mois si la présence de parasites pathogènes est suspectée. La première analyse se fait 6 à 10 semaines après la mise à l’herbe. Elle est inutile en hiver, les parasites étant en dormance.
  • L’autopsie : permet d’observer les espèces parasitaires présentes, l’importance de l’infestation et les organes touchés. L’autopsie est impérative lorsque le taux de mortalité est élevé.

Les résultats d’analyses sont à archiver en relevant la date et les informations suivantes : conditions climatiques, état et alimentation des animaux.

Prévenir l’infestation

L’observation attentive du cheptel, le suivi des performances et l’observation des pâtures sont les premiers atouts. Trois axes de travail sont à prendre en compte :

Le pâturage :

  • Rotation au pâturage de minimum 45 jours, ou fauche intermédiaire ;
  • Si possible, alterner le pâturage avec d’autres espèces animales ;
  • Eviter le surpâturage (= éviter le pâturage sous 5 cm de hauteur d’herbe);
  • Favoriser la diversité des espèces dans les haies (noisetier, frêne, châtaigner), veiller à la présence d’arbres ou plantes à tanin (plantain, chicorée, lotier).

L’alimentation :

  • Aliments riches en tanins ;
  • Distribution de blocs à lécher à base de plantes ou d’huiles essentielles à vertu vermino-statique ;
  • Vigilance à l’équilibre de la ration. Un déséquilibre fragilise l’immunité.

Les chevrettes :

  • Les exposer modérément et progressivement aux parasites, leur réserver des prairies non pâturées depuis 5 mois ;
  • Vigilance au printemps et à l’automne ;
  • Les mettre au pré sous la mère. Cela crée un premier contact parasitaire et la contamination sera limitée sur des animaux non sevrés ;
  • Sélectionner les mères peu traitées et dont les résultats de coproscopie sont indicateurs d’un bon état sanitaire.

Raisonner le traitement

Les traitements anti-parasitaires ne sont pas interdits en bio, cependant il faut éviter le traitement systématique de tout le troupeau et les utiliser de façon raisonnée, pour plusieurs raisons  : réduire les frais vétérinaires, permettre la sélection animale sur critères de résistance, freiner l’acquisition de résistance aux traitements des parasites, et minimiser l’impact environnemental.

Nos conseillers travaillent avec la Prospérité Fermière sur la promotion de cette filière émergente et proposent des rendez-vous régulièrement dans ce sens : formation au parasitisme, portes ouvertes, réunions filière… N’hésitez pas à contacter Sylvain : 07 87 32 38 79 - s.desrousseaux@bio-hdf.fr

Lait de chèvre filière longue