Et si ce jus vert était l’une des réponses pour la résilience et l’autonomie des fermes bio ?
Fertiluz : aux origines du projet
Des essais prometteurs, une plante qu’on trouve facilement en région, une possible réponse à des stress hydriques qui risquent de s’avérer de plus en plus présents… Voici des ingrédients qui ont permis à Fertiluz de voir le jour.
Fertiluz, c’est un projet multi partenarial qui permet non seulement de multiplier les essais en région avec des fermes partenaires mais aussi de bénéficier de compétences scientifiques pour faire ressortir les éléments clefs issus de nos travaux.
Les partenaires du projet et leurs rôles :
| Bio en Hauts-de-France | Portage et coordination
Test du jus de luzerne sur les cultures |
| Unilasalle
|
Caractérisation du jus de luzerne
Test du jus de luzerne sur les cultures Evaluation de l’utilisation du jus de luzerne |
| Agro-transfert
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Veille bibliographique
Synthèse des sorties des essais Evaluation de l’utilisation du jus de luzerne |
| Chambre d’agriculture Hauts-de-France | Test du jus de luzerne sur les cultures |
| SCEA du Clos Bernard | Impulsion du projet
Fourniture du jus de luzerne en vue des tests Test du jus de luzerne sur les cultures |
Soigner les plantes par les plantes, c’est le pari de Fertiluz. Le nom du projet peut sembler trompeur. Il ne s’agit pas d’une fertilisation au sens strict mais plutôt d’une biostimulation ! En effet, dans 1 litre de jus de luzerne, on trouve environ 4 grammes d’azote… ce qui est négligeable.
Alors, pourquoi utiliser du jus de luzerne sur les plantes ?
Ce jus vert présente une composition très intéressante pour les végétaux avec :
- Un ensemble de composés qui peuvent agir en synergie : acides aminés, vitamines, sucres solubles, saponines…etc
- Une molécule d’intérêt : le triacontanol
C’est bien le triacontanol qui nous intéresse particulièrement !
Cet alcool gras est associé aux cires cuticulaires de la luzerne. Cette molécule signal, encore appelée facteur de croissance, joue un rôle dans l’amélioration de la photosynthèse, de l’absorption de nutriment ou encore de la tolérance aux stress.
Et comment les plantes peuvent bénéficier du triacontanol de la luzerne ?
En broyant et en appliquant une pression sur la luzerne fraîche, on obtient au jus de luzerne qui contient, notamment, des micro-fragments cireux en suspension, et donc, le fameux triacontanol.
Dans Fertiluz, nous avons testé deux méthodes pour obtenir le jus de luzerne :
- A petite échelle, en utilisant un jet d’eau haute pression sur de la luzerne et en filtrant
- A plus grande échelle à l’aide dune presse viticole (vis sans fin).
Dans les deux cas, nous sommes partis de luzerne récoltée juste avant floraison et préalablement broyée.
Une fois le jus obtenu, la pulvérisation foliaire sur les végétaux va permettre au triacontanol de pénétrer dans l’épiderme de la plante ou même d’agir en restant à la surface.
Est-ce qu’il y a bien du triacontanol dans le jus de luzerne ?
C’était une question capitale… et il n’est pas si simple d’y répondre puisque les analyses sont coûteuses et qu’à ce jour un seul laboratoire est en mesure de les réaliser.
Tableau : résultats d’analyse de triacontanol (en mg/kg)
| Première coupe | Deuxième coupe | Troisième coupe | Odyssée
(produit commercial Angibaud) |
| 86,4
3,2 après stockage de plusieurs mois |
54,3 jus presse
40 jus « Kärsher » |
58,7 | 6,5 * |
* La fiche technique du produit indique 10 mg/kg mais le produit qui a été analysé avec été ouvert sur une longue période.
Les résultats du tableau ci-dessus montrent que le jus de luzerne est riche en triacontanol. On constate également que sa concentration diminue fortement au cours du stockage. Reste à étudier différentes manières de stocker le jus de luzerne, compatibles avec un stockage à la ferme.
Sur quelles cultures a été testée l’application du jus de luzerne ?
Sur les 3 récoltes entre 2023 et 2025, 15 essais ont été suivis par les partenaires du projet. Ces derniers ont été réalisés soit en condition « agriculteur » dans des fermes, soit en station expérimentale (UniLaSalle à Beauvais).
En plus de ces essais « officiels », d’autres ont été menés de manière plus autonome.
Les cultures qui ont fait l’objet d’essais Fertiluz sont :
- pomme
- tomate
- blé
- pomme de terre
Une synthèse de l’ensemble des essais est en cours de préparation.
Les principaux constats actuels sont qu’il y a une tendance à la hausse pour les rendements de blé ayant reçu du jus de luzerne. Elle n’est toutefois pas toujours significative.
Sur les tomates, il semblerait que le potentiel du jus de luzerne se soit davantage exprimé en année difficile (fortes chaleurs).
Les observations sur les pommes sont prometteuses avec un impact du jus de luzerne sur le rendement et le retour en fleurs.
Enfin, nous avons moins de recul concernant les essais sur pomme de terre qui ont débuté en 2024. Il semblerait que le jus de luzerne ait un impact sur le nombre de tubercules. En revanche, il est difficile de conclure à ce stade car le cadre statistique mérite d’être revu pour correspondre aux spécificités de cette culture.
Quelles suites pour le jus de luzerne ?
Au global, on peut dire que le jus de luzerne ne nuit pas aux cultures sur lesquelles il est appliqué, si on respecte un certain dosage.
Dans le cadre des essais Fertiluz, et compte-tenu des résultats d’analyse de triacontanol, la quantité de jus de luzerne appliquée a été relativement élevée même si non délétère. Pourquoi ne pas tester en réduisant les volumes apportés ?
Les partenaires aimeraient poursuivre les essais, notamment sur tomate, pomme de terre et pomme et pensent que le jus de luzerne pourrait avoir un intérêt sur des cultures à plus forte valeur ajoutée que le blé, comme le lin ou la lentille.
Ces 3 années d’essai nous amènent à nous dire que l’on n’a pas fini d’entendre parler du jus de luzerne dans les plaines !
CONTACTS
- Fanny VANDEWALLE : f.vandewalle@bio-hdf.fr
- Léa MOISAN : l.moisan@bio-hdf.fr















