Enflammez-vous !

Cet article propose un modeste rappel en ce début de saison des vertus et usages du thermique. Les oignons de semis sont déjà passés sous les feux de la rampe mais pour le reste, c’est le moment de raviver la flamme pour préparer les prochains semis ou assurer les premiers désherbages.

Au préalable, une petite précision : dès que l’on parle de thermique tout le monde imagine une flamme alors qu’en réalité, cela fait référence à de la température, froide ou chaude, sous différentes formes (solide, liquide, gazeuse, « biologique » ou électrique) et pour différentes applications (faux semis, désherbage pré-levée, post-levée et défanage).

Le froid brûle !

On utilise peu les températures négatives (état solide) ; même s’il y a eu des tentatives à l’azote liquide, elles n’ont pas trouvé d’utilisations pratiques. Pour autant, le froid est un moyen courant de destruction des couverts hivernaux (sarrasin, avoine brésilienne, phacélie, etc.) et de certaines associations de cultures (colza associé à de la féverole de printemps par exemple). Il sert également à stopper, dès les premières gelées, le développement du galinsoga, compagnon des maraîchers et endiviers.

Et l’exposition à la chaleur ?

Pour les températures positives, c’est une question de degré et de durée. Dans le compost (« biologique »), à 70°C, il faut plusieurs jours pour que l’essentiel des semences soient dégradé et quelques semaines si la température baisse. L’eau chaude (état liquide), température inférieure à 100°C, trouve de nouvelles utilisations en espaces verts en alternative aux désherbants chimiques. Sous forme de vapeur (état gazeux), température supérieure à 100°C, l’horticulture et le maraîchage en font usage depuis plus de 60 ans. La consommation de fuel (5000l/ha pour une désinfection), le temps de travail et le débit de chantier associés à cette technique ont cependant freiné son développement. La réduction des produits de synthèse combinée au développement de l’automatisation et à l’émergence de cahiers des charges tels que « zéro résidu », créent les conditions d’un nouvel intérêt pour cette technique, en production de salades 4ème gamme (sachet) par exemple. Pour les mêmes raisons, des prototypes sont élaborés depuis 3 décennies sur le désherbage électrique en localisé et en plein, quelques premiers appareils sont déjà commercialisés.

Mais le développement du thermique a surtout suivi celui de la pomme de terre (défanage) puis, plus récemment, du légume de plein champ. S’ils ont été précurseurs, les maraîchers bénéficient aujourd’hui des avancées techniques liées à ce changement d’échelle. Les gammes de matériels se multiplient avec des flammes plus ou moins protégées, des fours plus ou moins isolés pour améliorer l’efficacité et accélérer le travail.

En pratique : quelques utilisations

Les occasions d’utiliser un brûleur sont diverses et à chaque fois pertinentes. Les faux semis au thermique ont cet avantage, en ne remuant pas le sol, de limiter une nouvelle levée d’adventices en évitant la levée de dormance, par la lumière, de nouvelles graines. Dès qu’il y a des semis à faire, ça devient très vite un outil indispensable et très rentable. En grandes cultures on n’envisage pas de faire une carotte et encore moins un oignon de semis sans thermique alors qu’en maraîchage cela est encore le cas trop souvent. Même en conditions humides, il peut être efficace.

Tant que la culture n’est pas en place, il n’y a aucun risque à le mettre en œuvre. Dès que la graine est dans le sol, le compte à rebours commence pour intervenir avant la levée de celle-ci et après la levée des adventices (post-semi / pré levée). Les dernières interventions doivent prendre cela en compte afin d’éviter que la culture et les adventices ne lèvent en même temps, ou, que ces dernières ne lèvent juste après l’émergence de la culture.

Certaines adventices vont résister à la flamme : celles qui ont des réserves (chardon), les plantes dont la zone de croissance est protégée (graminées), celle dont la cuticule est un peu coriace (sanve), etc. Ce qui est vrai pour les adventices l’est aussi pour les plantes cultivées. Aussi, un bulbe d’échalote, une endive, un oignon de semis, une betterave… vont pouvoir être passés au grill et redémarrer ensuite (post-levée).

Une fois le démarrage de la culture assuré, l’entretien peut se poursuivre au thermique en binant. Soit avec du matériel spécifique, soit avec un montage sur une bineuse existante. L’intérêt est à nouveau de rendre une utilisation possible même si les conditions climatiques ne sont pas séchantes.

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Les réticences énoncées sont quelques fois le coût, mais l’inventivité et le savoir-faire des producteurs permettent de le diminuer fortement. Le type d’énergie est sans doute un point à travailler pour aller vers des ressources renouvelables : des tests - pas encore concluants - ont été faits en région avec de l’huile de friture. La consommation de gaz commence à partir de 8 kg /ha, ce qui reste acceptable. Et le débit de chantier faible (entre 2 à 4.5 km/h) est à mettre en balance avec le temps de désherbage manuel économisé.

En savoir plus :

Alain Delebecq

07.87.32.05.88

a.delebecq@bio-hdf.fr