Sécher collectivement la luzerne en grange

Un collectif d’agriculteurs s’est réuni au sein de la Cuma Som’luzerne pour investir dans un bâtiment de séchage solaire de luzerne en bottes, à Liéramont (80). L’objectif est d’obtenir un fourrage homogène en matière de qualité, facile à transporter, leur permettant un débouché fiable tout en valorisant leurs terres superficielles de craie. Il est en fonctionnement depuis le 10 mai 2022.

Ils sont seize adhérents, dont six en agriculture biologique. Si la plupart des membres sont des polyculteurs qui comptent vendre la luzerne en bottes, quatre éleveurs ont adhéré pour récupérer le fourrage et l’utiliser en autoconsommation. Sur le secteur, les conditions pédoclimatiques sont en effet propices à la production de luzerne, nécessaire à la rotation en agriculture biologique et intéressante pour valoriser des terres non rentables en cultures industrielles pour les producteurs en conventionnel.

Après 2 ans d’étude et de discussions, le projet a fini par voir le jour. L’investissement pour le bâtiment, l’unité de séchage et le matériel de récolte s’élève à 700 000 €, financé en partie par deux PCAE.

Pour sa première coupe, la CUMA a récolté 16 hectares pour remplir le bâtiment. Le territoire des adhérents est divisé en quatre secteurs, sur un rayon de 15 kilomètres autour du séchoir et récoltés les uns après les autres. L’objectif est de réaliser quatre coupes par an pour chaque secteur, de mai à octobre.

Un seul membre de la CUMA est chargé de la fauche de toutes les parcelles du secteur en cours, puis un autre membre pour l’andainage. Le foin est préséché au champ pendant trois jours, puis pressé et rentré immédiatement. Le foin de luzerne est récolté autour de 40% d’humidité, ce qui permet une meilleure qualité, car les feuilles qui contiennent le plus de protéines, encore fraîches, ne s’émiettent pas. Ils estiment pouvoir le valoriser 50% plus cher que du foin séché au champ.

Une fois rentré, il est séché toute la nuit, pour baisser rapidement le taux d’humidité, puis le séchoir fonctionne automatiquement pendant 3 à 4 jours, avec des phases de séchage toutes les 2h. Le coût du séchage en bottes est finalement identique au coût de prestation d’enrubannage.

Pour le pressage du foin et afin d’obtenir des ballots bien homogènes pour un séchage optimum, la CUMA fait appel à une Entreprise de Travaux Agricoles (ETA), faute de matériel adapté, mais compte dès que possible investir dans une presse à chambre variable (170 000 €). Le choix s’est tourné sur un séchage en bottes carrées et non en vrac, pour faciliter le transport pré et post séchage, et ainsi pouvoir les vendre vers la Belgique ou les Pays-Bas, pays acheteurs de fourrages. Chaque botte est numérotée, permettant la traçabilité.

Installés au bout du bâtiment, quatre ventilateurs soufflent de l’air réchauffé par les panneaux solaires dans des gaines qui arrivent sous le foin. En jours cumulés, le séchage représente 6 à 7 semaines par an. Au moment de la construction, la CUMA a donc fait le choix de revendre la totalité de l’électricité (prix fixe sur 20 ans). Mais aujourd’hui avec l’augmentation de l’énergie, le choix de l’autoconsommation et revente du surplus serait à étudier. Également à l’étude : le bâtiment pourrait permettre de sécher du soja, du maïs (avec grille), des oignons ou des pommes de terre en pallox. L’installation de deux gaines supplémentaires est prévue, voire la construction d’un deuxième bâtiment de séchage.