[PORTRAIT] Gladys Denis, éleveuse de chèvres à Merck-Saint-Liévin (62)

La chèvrerie de Merck, c’est une aventure familiale et engagée en bio depuis janvier 2022. Sans formation initiale dans ce domaine, tout a commencé en mars 2021 pour Glady Denis, alors conjointe collaboratrice, lorsqu’elle découvre la publicité d’une laiterie à la recherche de producteurs caprins en bio. Curieuse, elle visite une chèvrerie fin avril puis se lance. En un mois, le projet est mûri, et tout s’accélère : café de l’émergence, formation, passage devant le jury… Le 10 janvier 2022, elle est officiellement installée.

Dès mars 2022, les premiers chevreaux arrivent, nourris au biberon. En mai, 40 chevrettes rejoignent le troupeau, et en juillet, 60 autres issues d’une commande auprès de Chevrettes de France. Le bâtiment se termine fin juillet, intégrant dans la foulée une salle de traite. À l’exception de l’ossature, tout est réalisé en famille. La chèvrerie est conçue pour 250 têtes : aujourd’hui, 236 chèvres sont en lactation. « La première livraison de lait débute en janvier 2023, après une reproduction lancée dès août 2022. Le projet s’inscrit d’abord dans un partenariat 100 % avec la Prospérité Fermière, garantissant un débouché sécurisant ».

Une aventure familiale

La dynamique familiale s’ancre dans le projet : la fille de Gladys rejoint la ferme début 2023 comme aide familiale, avant de devenir salariée en avril 2025. Le beau-fils, séduit par la transformation fromagère, s’installe à son tour en février 2024. Il ouvre un magasin à la ferme en août 2024, après des essais concluants de fabrication de fromage. L’époux de Gladys développe de son côté l’engraissement de chevreaux dès janvier 2024. Si la vente des chevreaux reste une difficulté, l’atelier permet d’en valoriser une partie. Cette année, la ferme compte 371 naissances. « On essaie de faire adopter les petits, de vendre les boucs via des annonces, et d’informer les adoptants ».

Faire connaître la viande de chevreau

Convaincus de la qualité de la viande de chevreau – peu grasse, idéale pour les personnes avec du cholestérol – la famille s’attache à la faire connaître. L’événement Festi’Cabri, co-organisé avec Bio en Hauts-de-France dans ce sens au printemps, a rencontré un franc succès : 1 500 visiteurs, 150 repas servis, 138kg de viande écoulés, toute la production de fromage vendue à midi. « Une nouvelle édition est déjà programmée en 2026. C’est une occasion pour nous de valoriser cette viande peu connue ».

L’engagement en bio

Au-delà du cadre donné par la laiterie, l’installation en bio répond à une conviction personnelle forte. Formée à l’aromathérapie, à l’homéopathie et à l’acupuncture… Gladys applique ces méthodes en priorité sur ses animaux. « C’est bien plus facile que la médecine allopathique. Ça répond très bien sur une bête ». Malgré le stress généré par les contrôles, Gladys reste déterminée : « Ne rien oublier, rester rigoureux, c’est une contrainte, mais ça correspond aussi à notre façon de travailler ».

Une organisation structurée

Le troupeau est constitué de chèvres alpines chamoisées. Le pâturage tournant dynamique est pratiqué autour du bâtiment, il était impensable pour Gladys de pas faire profiter ses chèvres de la bonne herbe de Merck ! 15,3 hectares sont dédiés au foin et 2,5 hectares de méteil sont produits sur place. La traite est effectuée deux fois par jour. En 2024, 153 000 litres de lait ont été produits, pour un contrat prévu avec la laiterie à 225 000 litres au bout de 5 ans. Mais pour Gladys, pas question d’agrandir : « L’objectif est de rembourser les prêts, vivre du projet et maintenir la rentabilité. »

Aujourd’hui, 90 % du lait part à la Prospérité Fermière, le reste est transformé en fromage sur la ferme, vendu sur place et sur des marchés artisanaux. La ferme fonctionne avec 2 ETP et accueille des stagiaires ponctuellement. « Ici, tout se fait à la fourche ! » Le projet a embarqué toute la famille. « J’ai transmis la passion et je sais que la chèvrerie sera reprise par les enfants, c’est très satisfaisant. »

Gladys est membre du GIEE « Lait dix caprins bio » réunissant 10 éleveurs. Le groupe permet le partage de sujets techniques, comme la reproduction, la conduite au pâturage, la qualité des fourrages… Au-delà de l’aspect technique, Bio en Hauts-de-France travaille à la recherche de débouchés en viande comme en lait. Malgré un contexte difficile et incertain sur le marché bio, Gladys est convaincue d’une chose : « Je resterai en bio, je n’envisage pas de revenir en arrière ! ».

Fermoscopie :

  • 2022 : installation 100% en bio
  • SURFACE : 15 hectares de pâture
  • CHEPTEL : 300 chèvres alpines chamoisées
  • VENTE : en coopérative (90%) et transformé en fromage (10%)
  • EMPLOI : 2 ETP